Personne en train de pratiquer la sophrologie

Vous avez terminé votre formation de sophrologue, diplôme en main et plein de bonnes intentions, mais vous vous sentez perdu et démuni face à la réalité du terrain ? Vous n’êtes pas seul. Beaucoup de sophrologues fraîchement formés se retrouvent confrontés à un fossé entre la théorie apprise en école et la pratique quotidienne de leur métier. Dans cette série d’articles je vous propose des conseils concrets pour vous appuyer sur les principes fondamentaux de la sophrologie afin d’aborder sereinement vos clients en individuel comme en collectif.

Le schéma corporel comme réalité vécue : Accueillir sans jugement

Le premier principe fondamental de la sophrologie, le schéma corporel comme réalité vécue, est souvent mal compris ou mal appliqué une fois sur le terrain. Ce principe ne se limite pas à enseigner comment retrouver une respiration profonde ou abdominale, une « bonne posture » ou à aller chercher directement des sensations positives. Il s’agit plutôt d’aider vos clients à s’installer pleinement dans leur corps, à ressentir et accepter leurs sensations corporelles sans jugement.

En tant que sophrologue, notre rôle est de créer un espace sécurisé où nos clients peuvent explorer leurs sensations corporelles de manière authentique et neutre. Cela signifie accueillir chaque expérience sensorielle, chaque émotion, sans chercher à les transformer ou les juger. Ce principe trouve des résonances avec l’approche centrée sur la personne de Carl Rogers , où l’empathie et l’acceptation inconditionnelle du vécu de l’autre (et de votre propre vécu) sont primordiales.

Créer un espace d’accueil neutre

Pour appliquer ce principe dans votre pratique professionnelle, je vous conseille de développer votre propre capacité d’accueil bienveillant. Voici quelques conseils pratiques pour y parvenir :

  1. Pratiquez l’écoute active : Lorsque vous guidez vos clients, écoutez attentivement leurs descriptions de sensations corporelles sans interrompre ni interpréter. Accompagnez les dans le vécu et l’intégration de leur expérience en reformulant leur ressenti ou en les invitant à le préciser. Et surtout respecter leurs mots, expérience et perceptions même si ils ne correspondent pas à ce que vous auriez aimé induire chez eux grâce à la sophrologie. Si cela vous perturbe il est primordial d’aller accueillir ce que cela provoque chez vous ou de l’aborder en supervision.
  2. Évitez les corrections : Résistez à la tentation de corriger une respiration que vous pourriez percevoir comme « incorrecte » ou une posture que vous pourriez considérée comme trop fermée. Souvenez-vous que l’objectif est d’aider vos clients à prendre conscience de leur corps tel qu’il est, non de le modifier. Je rencontre beaucoup de clients qui ont dans un premier temps rejeter l’idée de pratiquer la sophrologie parce qu’ils se sont sentis jugés par rapport à une respiration superficielle qu’ils n’arrivaient pas à modifier ou une détente corporelle qui leur était alors impossible.
  3. Encouragez l’auto-exploration : Invitez vos clients à explorer leurs sensations corporelles lors des exercices de relaxation dynamique ou des visualisations positives. Posez des questions ouvertes qui encouragent l’activation de la proprioception et de l’intéroception comme « Que ressentez-vous en ce moment ? ».
  4. Modélisez l’acceptation : Montrez l’exemple en acceptant vos propres sensations corporelles sans jugement. Pratiquez vous même régulièrement pour renforcer votre propre schéma corporel comme réalité vécue. Vous aurez beaucoup de mal à accompagner vos clients dans l’intégration de leur schéma corporel si vous rejetez certaines sensations qui ne vous semblent pas compatibles avec le métier de sophrologue : diaphragme bloqué, respiration haute, tensions musculaires. Ces sensations doivent d’abord être acceptées et accueillies avec bienveillance avant de pouvoir être régulée si nécessaire.

Exemple Pratique

Imaginez une séance où un client exprime des sensations de tension dans les épaules. Au lieu de suggérer des modifications spécifiques pour « relâcher » cette tension, guidez-le à travers un exercice de prise de conscience corporelle. Dites-lui par exemple : « Portez votre attention sur vos épaules. Que ressentez-vous exactement ? Essayez de décrire cette sensation sans chercher à la changer. ». Ensuite, encouragez-le à accepter cette sensation telle qu’elle est, sans jugement ni tentative de modification. Cette approche aide à renforcer le principe du schéma corporel comme réalité vécue. Vous pourrez ensuite travailler le relâchement ou pas…

A cet exemple vous me répondriez peut-être : « Oui mais Emmanuelle le client vient pour relâcher ses tensions je ne peux pas me contenter de les décrire et de le laisser repartir dans le même état ». Si cette remarque fait écho chez vous je vous encourage à vous demander qui souhaite que le client ressorte parfaitement détendu de votre cabinet ? S’agit il de votre client ou de vous qui doutez de vos compétences et ressentez le besoin de prouver ce que vous pouvez apporter ?

Je rajouterai même qu’accueillir le client dans sa réalité objective sans chercher à tout modifier trop vite est une composante essentielle de l’alliance. En cabinet ou lorsque j’interviens en entreprise il est très fréquent que des personnes m’expriment un soulagement quant au fait de ne pas se sentir jugée ou dysfonctionnels avec leurs manifestations de stress, leur difficulté à se détendre et à lâcher prise.

Conclusion

Appliquer le principe du schéma corporel comme réalité vécue dans votre pratique de sophrologue nécessite un engagement profond à l’accueil et à l’acceptation. En cultivant cette capacité en vous-même et en la modélisant pour vos clients, vous pouvez les aider à développer une relation plus saine et plus harmonieuse avec leur propre corps. Cette compétence essentielle, une fois maîtrisée, transformera non seulement vos séances de sophrologie, mais aussi la manière dont vos clients vivent leur propre corps au quotidien.